jeudi 28 décembre 2006

Percussions Traditionnelles de Cuba

ENGLISH VERSION HERE
EN ESPAÑOL AQUĺ

Manley "Pirí" López Herrera
est le plus jeune membre de la désormais célèbre famille de tamboreros "Los Chinitos de la Corea", inventeurs du guarapachangueo, joueurs de tambours batá et initiateurs de la série de cds "Abbilona" (16 cds déjà parus). Il est considéré comme l'un des enfants surdoués les plus talentueux de l'île de Cuba.


Depuis son tout jeune âge Piri joue la Rumba dans des groupes professionnels, et les tambours Batá ou les "Cajones al Muerto" dans les orchestres de rituels. Sa légende a grandi lorsqu'à l'âge de 15 ans il a remplacé "au pied levé" des Olubatá accomplis lors des séances d'enregistrement pour les 45cds du projet Abbilona, alors qu'il n'avait jamais mis le pied auparavant dans un studio d'enregistrement.

English version:
manleycvenglish.blogspot.com

mercredi 27 décembre 2006

Lexique explicatif des styles présentés

(Crédits Photo: Daniel Chatelain)

Tambours Batá:
Instruments principaux des rituels des esclaves Yoruba de Cuba originaires du Nigeria. Avec les chants, ils permettent la transe de possession des initiés par les dieux de la religion afro-cubaine dite "Santería".

Cajones:
Tambours de bois des rituels appelés "Cajones al Muerto" ou cérémonies spiritistes, permettant la transe de possession des initiés par les esprits des morts. Cette religion est un mélange de cultes catholiques, congo et yoruba.

(Crédits Photo: Dossier Officiel Rumberos de Cuba)

Rumba:
Musique profane populaire dans laquelle on utilise également les cajones, et les congas.

Guarapachangueo:
Style de rumba créé dans les années 1970 par la famille López, qui a influencé ensuite la rumba dans toute l'île de Cuba au cours de la décennie suivante. Le nom qualifie également un nouveau type de cajón "à compartiments" également créé par les frères López.

mardi 26 décembre 2006

Curriculum Vitae

MANLEY "PIRI" LÓPEZ HERRERA
Spécialiste en percussions afro-cubaines
-Musicien initié de l'ensemble de tambours de rituels yoruba "Añá Obba Tola", appartenant à sa famille.
-Musicien de rituels dans les "Cajones al Muerto" ou cérémonies spiristes, également avec sa famille.
-Membre de la Compagnie internationale "Raices Profundas" de Juan de Dios Rámos "El Colo".
-A enregistré 17 cds distribués dans le Monde entier.

Né le 15 juin 1981, Manley est le plus jeune d'une famille de percussionnistes appelée "Los Chinitos", du quartier de la Corea, situé dans l'arrondissement de San Miguel del Padrón, à La Havane.
Cette famille est composée de quatre frères López: Reynaldo, Berto, Irián, et Pedro, et de son fils Manley. On a surnommé cette famille "los Chinitos" (les petites chinois) parce qu'ils sont, comme le dit Pedro López, "achinados" (ils ont "du chinois" - dans leur visage).

(Mario "Aspirina" Jáuregui et ses petits-enfants
Crédits photo: Christine Ammour)



Expérience professionnelle
:

-En 1991: Manley a commencé à jouer dans les rituels yoruba à l'âge de 10 ans, et connaissait déjà l'ensemble des rythmes sacrés sur les tambours d'accompagnement, qu'il avait appris avec son oncle Irián.
-Entre les années 1991 et 1997 il a intégré plusieurs formations de musiciens de rituels dont le "Tambor de Amador", le "Tambor de Pedro Aspirina" et en 1997 a définitivement intégré le "Tambor de Lázaro Cuesta" appelé "Añá Obba Tola", qui est aujourd'hui dirigé par son père Pedro López. Manley est maintenant le musicien principal du groupe.

-En 1995, Manley intègre le groupe "Aspirina Guaguancó" constitué de jeunes talents. La famille des "Aspirinas" de Guanabacoa est la plus célèbre famille de rumberos de La Havane, depuis les années 1940.

(Le jeune Manley "Piri" à 16 ans pendant les séances d'enregistrement du projet "Abbilona")



-À partir de 1997, les "Chinitos" ont commencé à réaliser des enregistrements commerciaux de tambours Batá, avec le projet "Abbilona", comprenant 45 cds, enregistrés en 4 saisons. Ces disques sont reconnus dans le Monde entier comme le travail le plus accompli dans le domaine de l'afro-cubain, mais également comme les mieux appropriés à l'étude de la musique yoruba de Cuba. Irian López en est le directeur artistique, et dirige les séances d'enregistrement. Les joueurs de tambour invités n'accomplissant pas le travail demandé de façon satisfaisante, Irián décide de faire appel au jeune Manley, qui a tout juste 16 ans, pour les remplacer au dernier moment. Manley pose pour la première fois de sa vie un casque audio sur sa tête, et, nullement impresionné par les conditions du studio, fait preuve d'un grand professionnalisme en enregistrant toutes les parties qu'il a à jouer en une seule prise. Il prend donc d'emblée une place prédominante dans le projet "Abbilona". Les musiciens cubains et les occidentaux ayant accès aux cds auront du mal à croire que les parties d'itótele (second tambour), difficiles car demandant une concentration permanente sur le jeu du tambour principal, et qui de plus comportent des variations nombreuses et sophistiquées, sont jouées par cet adolescent de 16 ans. Manley enregistre, sans jamais faillir, la matière sonore nécéssaire à la réalisation des 45 cds prévus par le projet.

-En 2004 il entre dans la compagnie folklorique "Raíces Profundas" dirigée par le grand chanteur Juan de Diós Ramós "El Colo". La compagnie fait partie des plus prestigieuses troupes folkloriques cubaines. Elle tourne internationalement depuis une quinzaine d'années. Au sein de cette compagnie, Piri se perfectionne dans tous les styles de folklore cubain, et apprend les rouages des chorégraphies modernes et du ballet, éléments non-traditionnels des troupes de danse cubaines utilisant le folklore et tous ces éléments dans un contexte "contemporain".

Manley maîtrise l'improvisation et l'accompagnement de la danse sur la quasi-totalité des 100 styles du monde afrocubain.
Il joue et enseigne les styles suivants:

Rumba (Columbia, Guaguanco, Yambù, Guarapachanguero)
Comparsa (musique de carnaval)
Yoruba (tambours Batas, Guïro, Bembé, Iyesá)
Congo (Yuka, Makuta, Makutica, Palo)
Arará (Hebbioso, Afrekete, Asoyí, Asojanú, Mase, Tiñosa)
Tonada Trinitaria
• Folklore "de Oriente" (Gagá, Vodú, Merengue haitiano-cubain, Tumba francesa, Tajona, Yubá Cobrero, Yubá Macota, Masón, Frenté, Manganzila)

Les "Chinitos" sont également des musiciens professionnels d'autres styles de rituels afro-cubains tels le "Guïro", et le "Cajón Espiritual" ou "Cajón al Muerto". Ils participent souvent aux "Sábados de la Rumba", manifestations hebdomadaires à l'initiative du Conjunto Foklórico Nacional.
Manley est engagé dans au moins 15 manifestations afro-cubaines par mois dont 10 au moins sont des cérémonies yoruba où il joue les tambours Batá.

Manley est réputé pour faire preuve d'une grande créativité, et ses improvisations influencent à l'heure actuelle de façon marquante l'évolution des styles de jeu afro-cubains à La Havane. Il est un des jeunes artistes les plus remarqués à La Havane.

(Piri et Antoine en Italie)


Expérience pédagogique:

La transmission des musiques afro-cubaines s'est faite jusqu'à aujourd'hui de manière essentiellement orale. Manley a appris de cette façon depuis l'enfance avec ses oncles. Les Écoles d'art et les Universités cubaines enseignent également ces musiques depuis leur création dans les années 1960. Cela n'empêche pas la tradition orale de perdurer, et de rester un mode d'apprentissage privilégié chez les Cubains comme chez les étrangers vénus étudier à Cuba.
Depuis le début des années 80, les "Chinitos" enseignent chez eux les musiques afro-cubaines, à de nombreux étudiants venus du Monde entier. En 25 ans, ils ont connu un grand nombre d'élèves, et Manley, dès l'âge de 10 ans, a commencé à accompagner les cours avec ses oncles. Dès lors est née sa vocation particulière de transmission de son savoir. À tous ceux qui montrent de l'intérêt pour ces musiques, il dit souvent lui-même:
"J'aurai beau faire partie des meilleurs dans mon domaine, une fois que je disparaitrai: que restera-t-il de moi? Par contre, si je transmet mon savoir, ma culture continuera d'exister et peut-être ainsi parlera-t-on de moi un jour comme d'un maître?".
Manley enseigne depuis 6 ans à Cuba. Il a enseigné en Italie, en Belgique et en France.

(propos recueillis par Antoine Miniconi).

Antoine Miniconi C.V.

À 25 ans, ce percussionniste avignonnais est dans sa cinquième année d'étude à La Havane. Il est assesseur et responsable de Manley "Piri" López en France.

Né le 9 janvier 1982 à Carpentras, Antoine a commencé la musique en amateur, et après avoir passé un an dans une petite école de Musiques Actuelles, il a commencé l'étude de la percussion afro-cubaine en 2000. En 2002 il arrive pour la premiére fois à La Havane, et s'inscrit à la CNSEA, école cubaine de musique internationale, où il apprend la musique populaire et la musique afro-cubaine.
Il s'intéresse très tôt aux tambours batá, et suit les cours d'Alejandro Carvajal Jr. dès son entrée à l'école. La longueur de son séjour et son immersion progressive dans le monde de l'afro-cubain change sa vision de la musique cubaine, et il adopte de plus en plus l'enseignement oral des musiciens afro-cubains.
Il se consacre de plus en plus à l'étude de l'énorme répertoire du tambour batá, dont il maîtrise les deux tambours accompagnateurs, okónkolo et itótele, commençant à jouer dans les rituels.

Il est actuellement apprenti-mayorcero (joueur d'iyá) dans le "tambour" Aña Oba Tola des frères López, plus connus sous le nom des "Chinitos de la Corea". Il est l'élève du jeune prodige de la famille López, Manley "Piri" López Herrera.
Il participe a de nombreuses manifestations musicales rituelles et populaires.

Ses différents professeurs depuis le début de son séjour d'étude à Cuba:
- Raúl "Lalí" González Brito (ex-membre du Conjunto de Clave y Guaguancó, plus ancien groupe de rumba de Cuba).
- "Palillo", ex-membre du groupe de Pedro Izquierdo dit "Pello el Afrokán".
- "Dahomey", professeur à l'École Nationale des Arts de La Havane.
- Nawito, accompagnateur de danse officiel de l'École Nationale des Arts de La Havane.
- Yoendris, petit-fils de Gregorio "El Goyo" Hernández.
- Alejandro Carvajal Jr, professeur de la CNSEA, accompagnateur de la ENA, membre du "tambour" de Papo Angarica, et artiste de la troupe du célèbre cabaret "Tropicana".
- "Freddy", tumbador du célèbre groupe de Rumba "Grupo Yoruba Andabó", membre du "tambour" de Papo Angarica.
- Manley "Piri" López, membre de la famille des Chinitos et de la compagnie de Danse "Raices Profundas" de Juan de Dios "El Colo".

lundi 25 décembre 2006

La Musique de la Famille López


Les musiciens du tambour Aña Oba Tola: X, Eliade, Piri, Fredy (chanteur), Reynaldo, Berto, Osniel, X

Le père et l'oncle de Pedro López (père de Manley), dirigeaient dans les années 1940 un orchestre de Son (musique populaire), qui jouait pour les fêtes calendaires. À la fin de leur prestation, on jouait la Rumba, musique hybride entre l'afro-cubain et la musique populaire. Les "peñas" (fêtes populaires) de rumba de la famille López sont devenues célèbres dans tout La Havane, attirant bientôt des musiciens de renom tels "Los Aspirina" (plus célèbre famille de rumberos de La Havane), de l'arrondissement voisin de Guanabacoa, ou encore Juan De Dios Rámos "El Colo" ou Maximino Duquesne Francis.


(Pablo Roche "Akilakuá" dans les années 1950, Crédits Photo: John Mason)


La famille "Aspirina" est également connue pour avoir été proche du légendaire Pablo Roche Cañal "Akilakuá", le plus grand joueur de tambours batá de Cuba de tous les temps. Mario Aspirina Jáuregui est un des rares élèves de Pablo Roche encore en vie. Malgré l'évolution du style de jeu des tambours batá, Pedro (disparu) et Mario Aspirina sont reconnus comme les gardiens du style ancien de Pablo Roche.
Ce sont eux, qui, prenant les frères López sous leur aile, leur ont enseigné les tambours sacrés du culte yoruba de Cuba, dits: "tambours Batá".
Ils ont permis aux Chinitos d'intégrer leur célèbre orchestre de rumba: Aspirina Guaguancó.
Tout en étant considérée dans le monde de la musique afro-cubaine comme la plus inovatrice des familles de musiciens de tout Cuba dans les vingt dernières années, la famille López a collaboré avec les plus authentiques et les plus anciens musiciens de La Havane.

Le père et les Oncles de Manley:

Pedro López est le père de Manley. Il a travaillé comme charpentier avec l'homme qui d'après lui aurait le premier inventé le cajón "pyramidal" de Cuba: Ifraín Kofa Frioles. On l'a récemment contacté pour entrer dans un projet de rumba regroupant des musiciens célèbres, similaire au "Buena Vista Social Club".

"Bertico" López est lui aussi percussionniste, et il a intégré le célèbre orchestre de rumba "Grupo Yoruba Andabó", qui s'appelait auparavant (depuis 1961) "Guaguancó Maritimo Portuario". Il a ainsi amené le guarapachangueo au sein du groupe, et influença le célèbre Pancho Quinto Mora, un des plus grands joueurs de tambour de Cuba, disparu l'année passée.


Irián López, l'oncle de Manley, a été membre du prestigieux Conjunto Foklórico Nacional de Cuba, regroupant les meilleurs spécialistes de l'île, dans les années 1980. Il apparaît dans le film "El País de los Orichas".

Reynaldo est le quatrième frère de la famille. Il est percussionniste et chanteur. Son répertoire de rumba est inépuisable.

Au cours des années 1970, les Chinitos ont inventé un style de Rumba appelé "Guarapachangueo"
(ou, comme ils le nomment eux-mêmes, "Guarapachanguero") qui a créé une révolution dans le monde de la Rumba. Le style "moderne" de groupes tels:
"Conjunto de Clave y Guaguancó" ou
"Grupo Yoruba Andabó" est issu d'éléments empruntés aux Chinitos.
La Rumba est une manifestation profane, où chacun peux exprimer ses sentiment en chantant. Elle induit un échange permanent entre le chanteur et les gens présents qui lui répondent en choeur.
Les instruments de cette musique sont exclusivement des percussions, utilisant des rythmes et des phrases très syncopés. Il s'agit-là d'accompagner des chants, mais aussi des danses. Le chant prédomine jusqu'à l'apparition du refrain, ou "estribillo", à partir duquel l'élément prépondérant devient la danse.


(Foto: ©Rebecca Bodenheimer)

Trois rythmes principaux sont utilisés, mettant en scène différents styles de chant et de danse:
le Yambú, la Columbia et le très populaire Guaguancó.
La Rumba est née conjointement dans les ports
(La Havane, Matanzas et Cárdenas) et à la campagne (Sabanilla, province de Matanzas, où serait apparue la Columbia).
La Rumba est aujourd'hui pratiquée dans tout Cuba, aussi bien à la ville qu'à la campagne, et fait partie intégrante de la culture cubaine.
Les tambours utilisés sont à l'origine des cajones (tambours de bois), puis des congas. Les "Chinitos" ont inventé leur propre type de "cajón", créé par Pedro, adapté au style "Rumba Guarapachanguero".


(Manley, ses oncles et les musiciens de leur orchestre de rituels yoruba devant la bannière de leur "tambour de fundamento" Aña Oba Tola)

Les quatre frères López ont commencé à jouer les tambours Batá dans les années 1980 et possèdent maintenant leur propre jeu de tambours consacrés
(ou "tambour de fundamento"), portant le nom de "Aña Obba Tola", qui est maintenant reconnu comme parmi les plus prestigieux de La Havane.
Manley est né dans cet environnement bouillonnant, et a toujours montré un grand intérêt pour la musique. Il a étudié depuis le plus jeune âge avec son oncle Irián. Il est maintenant le nouveau soliste de la famille, et il est cité à La Havane comme faisant partie de la "jeunesse talentueuse" du monde folklorique afro-cubain.

dimanche 24 décembre 2006

Entretien avec Pedro López (VF)


Dans cet entretien, Pedro López, interviewé par Antoine Miniconi, nous raconte l'histoire des Chinitos et de leur rumba, comment ils ont appris les tambours batá, et comment du fin fond de leur quartier de San Miguel del Padrón, loin du centre de la ville, ils ont été propulsés sur l'avant-scène de la musique folklorique havanaise.

Antoine: "Raconte-moi d'abord quelle fut votre histoire, celle des Chinitos, celle des oncles."
Pedro: "Nous maintenons une tradition familiale: mon père et mon oncle avaient un sexteto de Son. Je n'étais pas encore né. Mon nom est Pedro López Rodríguez. Nous, les Chinitos - nous ne sommes pas si nombreux - avons le visage "de type asiatique". On nous appelle "les Chinitos" depuis que nous avons créé nos premières activités dans le quartier de "La Corea", ici". (La Corea = "La Corée"; ndt).
"Mon père et mon oncle se réunissaient tous les ans, traditionnellement le jour de la Fête des Mères,
le 31 décembre, à Pâques, et organisaient leur fête, ici, jouant leur musique de Son. Mais ensuite ça finissait toujours en rumba. Les gens se mettaient à taper sur une étagère, un buffet, sur une petite caisse…
Et ça a créé quelque chose que nous nous sommes approprié, que nous avons intériorisé. Et à partir de là nous avons maintenu cette tradition tous les ans, sans penser qu'un jour cela prendrait une telle importance, du jour au lendemain…
Ensuite, avec le temps, entre les années 70 et 80 - ça a dû être en 75 ou en 76, plus ou moins - nous avons créé une espèce de polyrythmie. Un de nos amis, qui était un des plus grands rumberos qu'il y ait eu à Cuba - on l'appelait "El Llanero" ("l'habitant-de-la-plaine"), je crois que son nom était Martínez, il vit là-bas aux États-Unis, maintenant, et d'une manière péjorative, il a donné à ce que nous jouions le nom de "guarapachangueo".

(Pedro et son fils Piri)


À l'époque nous faisions de la rumba de manière spontanée, sans imaginer qu'un jour ça allait prendre une telle importance. Untel jouait sur le mur - "tikitin" - et tel autre sur un cajón - "tukutum". Nous avons commencé à utiliser un cajón qui était une table de nuit qui appartenait à ma grand-mère Mamaíta.
Mon oncle avait un cajón de contreplaqué, qui avait un moteur à hélice à l'intérieur - c'était son ventilateur à lui - et on a commencé à y jouer un tumbao, assis dessus. Et on changeait sans arrêt de place: "toi, prends ce cajón, je prends celui-là, etc…". On a commencé à jouer ces rumbas, quand les gens se réunissaient, chacun de ces jours spéciaux. Et même certains jours ordinaires, alors tout le monde s'y mettait, toute ma famille, mon frère José, etc…
Et de tout ça est finalement resté le nom de "guarapachangueo", qu'El Llanero lui avait donné de façon péjorative: "regardez-moi ça, cet espèce de guarapachangueo qu'ils sont en train de jouer…!"
À partir de là, nous avons commencé à fabriquer notre propre style de cajones, qui est le véritable guarapachangueo (le cajón grave), et ensuite le premier cajón trapézoïdal jamais fabriqué à Cuba, par un ami, Ifraín Kofá Frioles, qui m'a dit: "je vais te faire un cajón trapézoïdal pour qu'il te glisse pas entre tes jambes quand tu joues".
(Pour jouer les "basses" sur le cajón, les percussionnistes le soulèvent avec les jambes, et un cajón rectangulaire glisse naturellement vers le bas quand on le frappe; ndt.)

C'est le premier qui a fabriqué un cajón de ce type. À cette époque, je travaillais comme menuisier avec lui, et il m'a donné tous les conseils pour que je puisse ensuite fabriquer tout ça moi-même.
Après cela, avec le temps sont venus les fils. Piri a appris avec nous, ici-même. À l'âge de quatre ans il jouait déjà de tout ce qu'il pouvait, car il avait déjà de sérieuses aptitudes pour ça. Il est venu au Monde avec la musique, en entendant déjà dans le ventre de sa mère de la rumba et tout ça. Nous nous faisions rien de rituel à l'époque, aucune musique de Saints, rien de religieux: notre domaine était rumba, rumba et rumba.

(José Luis Quintana "Changuito")


Après, par la suite, effectivement, quand s'est créé Raices Profundas, nous avons commencé à pratiquer la musique afro-cubaine, en 1980. Et ça aussi a commencé à prendre de la force. J'ai eu le privilège de rencontrer un des tout premiers grands musiciens de Cuba, "Changuito" (José-Luis Quintana). Cela n'a été à proprement dit une entrevue, sinon que simplement nous dialoguions avec lui, à propos de ce nouveau rythme que nous avions créé. Je lui ai montré un peu ce que nous faisions, et lui m'a dit qu'il avait incorporé ça dans son jeu de batteur. Tout ça lui a beaucoup plu. Le guarapachangueo a commencé à prendre de la force, et encore de la force.

(Pancho Quinto)


Aujourd'hui il y a beaucoup de groupes qui en font beaucoup d'autre choses, parce que le guarapachangueo est une matrice. Ils en ont fait une polyrythmie. Pancho Quinto a été le premier, et ensuite Maximino Duquesne.

(Maximino Duquesne)


Par la suite, à partir du guarapachangueo ils ont fait leur créations. "Leurs évolutions" ont-ils dit, par rapport à cette matrice. Et nous avons eu la chance de partager également des choses avec Yoruba Andabó. Nous participions à leurs fêtes, à leurs rumbas. Ils ont toujours approuvé cela. Ils nous ont donné la capacité de développer tout ça, et à eux aussi ça leur a permis de développer leur style.

(Juan de Dios Rámos "El Colo")


Mais tout cela est né de la matrice originelle du guarapachangueo, créé par nous, les Chinitos, avec leur bénédiction. Et avec celle de tous les grands rumberos: Juan de Dios (Rámos), (Ricardo Gómez) Santa Cruz, Alambre… (Antonio Rivas?) Alambre, un autre grand rumbero d'ici. Nous avons eu la chance de le rencontrer à Matanzas avec les Muñequitos. Et même eux, les Muñequitos de Matanzas, ils l'emploient, ils ont changé leurs patrons ryhtmiques, et ils ont à leur répertoire une chanson - je ne rappelle plus laquelle - dans laquelle ils "virent" au "tukutum", au guarapachangueo.

(Les Muñequitos de Matanzas)


C'est-à-dire qu'il a pris une telle importance que tout le monde l'emploie. Il existe beaucoup de polyryhtmies, des choses que je ne comprends pas, non pas qu'elle soient mauvaises, mais je ne les comprends pas. Parce que je crois qu'à la musique il faut donner de l'espace (du silence), pour qu'elle respire, pour tout musicien, comme par exemple un guitariste. Je ne connais pas grand-chose en musique. Je sais qu'il y a une "clave negra" et une autre de Son, mais je ne peux pas parler de partitions, ni de syncope, parce que je ne connais rien de tout ça.
Mais en résumé, ils font beaucoup de choses qui ne me plaisent pas. Non pas qu'elle soient mal faites, mais simplement que je ne les aime pas. Je crois qu'il faut toujours qu'il existe un dialogue entre la percussion, le chant, et le spectateur. Pour moi, tous ces groupes jouent de la rumba, et toutes leurs polyryhtmies sont bonnes, mais certaines me plaisent et d'autres non.

À partir de là, Piri, depuis tout petit s'est mis à jouer le kónkolo (le plus petit des tambours batá). Dans les tambours de fundamento, dans celui où nous étions avec Amador, dans le tambour de Pancho Quinto, avec celui de Román Diaz, et ensuite nous avons eu accès à l'essence du tambour batá, avec Pedro Aspirina - Pedro Addé, Pedro Pablo Aspirina, celui qui était à l'origine avec Pablo Roche. Il avait commencé tout petit avec Pablo Roche. (Il semble qu'il y ait eu deux Pedro Aspirina, dont l'un se nomme Pedro Pablo, différent de celui qui aurait pris la direction du Coro Folklórico Cubano dans les années 1990. D'après ce que je crois Pedro Pablo serait décédé, alors que l'autre Pablo serait toujours en vie; ndt.). Et nous avons eu la chance qu'ils nous intègrent dans leur tambour, pour notre caractère, notre manière d'être, notre correction. Pedro était un homme de respect, un homme très sérieux. Nous avons donc eu la chance de commencer à étudier avec lui, et de lui nous avons appris beaucoup de phrases, parce que là était l'essence du tambour batá, comme l'est Papo Angarica, comme l'est Jesús Pérez, et lui, Pedro était tamborero avec Jesús Pérez, et Jesús était élève de Pablo Roche.

(Jesús Pérez, Crédits photo: John Amira)


Il faut par conséquent le dire: nous sommes - et Piri lui aussi quand il était petit - est "tombé dans la Mafia" (il veut dire, sans aucun sentiment péjoratif, "avec les caïds") avec eux, je peux dire ça, dans le plus grand sein d'Añá, du tambour. Et c'est à partir là que ça a vraiement commencé, que le feu a pris. Nous tous étions là à les écouter jouer… par exemple Mario Aspirina, Mario Jáuregui, de la famille-même des Aspirinas, car tous sont d'une même famille - et nous les admirions beaucoup - tout c'est fait comme ça: "va par là, viens voir ça ici, viens par là…": ils nous ont aidé, et Piri avait déjà le feu, trèes vite, il connaissait tous les "toques". C'était un prodige, ils l'admiraient beaucoup, et c'est la chance que nous avons eue.
Tout dans le guarapanchangueo vient traditionnellement de chez nous, mais rien de yoruba, parce que nous étions dans la rumba. Et il y a une théorie, qui est mienne, selon laquelle la rumba est la plus parfaite de toutes les musiques populaires qui existent à Cuba. Certains disent que c'est le Son. Il est certain que le Son était là en premier avec le yambú et le Changüí. Je crois que le plus ancien est le yambú.


Mais de ces années-là, de l'ancien temps je ne sais pas grand-chose. Tout ça a commencé avec le "tukutum-kutum" de la rumba et on a ajouté ensuite la marímbula, et après est venu le Son, avec les septetos, mais tout cela a un début, c'est-à-dire qu'en premier est née la rumba, et tout le reste est venu après. Entre la musique populaire et la musique foklorique, je ne saurais dire, il y a des scientifiques qui s'occupent de cela, parce qu'ils étudient. Mais selon ma théorie, la musique la plus populaire qu'il y ait à Cuba, c'est la rumba.
Rends-toi compte: tu vas à une fête - n'importe quelle fête. Et quand c'est fini les gens restent assis et attrappent une boite de conserve, un bâton, et ils commencent à jouer. Après que la musique soit terminée, commence une autre musique, et tout ça se finit en rumba - c'est ma théorie.
C'est comme ça que nous avons commencé, c'est une tradition familliale. Ensuite nous avons eu de la chance d'avoir Irián. Irián était plus jeune que nous, et il captait tout. Et avec Irián s'est formé Piri, toujours collé à Irián, qui lui a donné beaucoup. Tous deux ont l'esprit clair, sans problèmes, ils avaient tout. Ils avaient la faculté d'employer leur talent pour le tambour batá, pour Añá. Ils ont toujours travaillé à deux.

Dans Abbilona, d'autres tamboreros sont venus jouer au studio, et Irián leur a dit: "Non, non! Piri, joue-le toi, pour que ça soit bien fait." Et le segundo (itótele), c'est Piri qui l'a joué. Piri a pris un casque, il s'est mis à enregistrer, et il a tout fait en une prise. (…)
Le cajón guarapachangueo trapézoïdal, écoute bien: il y a de gens qui disent que ça a été fait en premier par "Areíto" (une entreprise discographique cubaine): non. Le premier qui est sorti d'ici a été fabriqué pour Pancho Quinto. C'est Ifraín Kofa Frioles qui l'a fabriqué, qui est parti du pays. Il vivait ici, et il parti pour les États-Unis, et il s'est fait assassiner là-bas. C'était un des plus grands galleros (maître dans les combats de coqs) qu'il y avait à Cuba. Il officiait avec ses coqs au Club Habana, où à l'âge de 16 ans il était difficile d'entrer, et il y est rentré. C'était un des meilleurs "espueladores" (fabriquant d'ergots ou éperons pour coqs de combat) de Cuba, il fabriquait des ergots de coqs. Mais il travaillait également dans la menuiserie. Il me disait: "je fais te faire un cajón qui ne glisse pas". Et ce premier cajón est resté ici à Cuba dans un musée, où Irián l'a laissé après un concert. Donc, c'est lui qui est l'initiateur du cajón trapézoïdal à Cuba, et personne d'autre. (…)

Yoruba Andabó s'est créé (à partir du groupe "Guaguancó Maritimo Portuario" en 1981; ndt) avec mon frère Bertico, membre-fondateur du groupe avec Pancho Quinto. Celui qui faisait dans Yoruba Andabó le "kipatin-patin-patokotom", c'était mon frère Bertico. Chori et Julio El Gordo l'y ont maintenu ensuite. Ce qui a été rajouté après, je ne le comprends pas. En tout cas le cajón guarapachangueo, c'est Berto qui l'a maintenu dans cette tradition, avec Pancho Quinto et ses inventions, de la cuiller et des trois batá, un style très particulier. Ainsi était Pancho et ça s'est déjà perdu, son style à lui, personnel. Mais, tu vois, le guarapachangueo vient d'ici, de La Corea."

Antoine: "On m'a dit qu'ici, il y a quelque temps, il y avait une rumba chaque week-end, dans ce pâté de maisons, non?".
Pedro: "Ici, oui, chaque dimanche, dans les années 70, jusqu'en 1980, jusqu'à ce que s'en aille "la racaille", comme ils disent, "la racaille", quand les gens sont partis du pays. (Pedro fait ici allusion aux évenements de 1980, quand Fidel Castro, ayant passé un accord d'immigration avec les USA, a autorisé ceux qui le désiraient à quitter le pays, en mettant à leur disposition des cargos partant du port de Mariel - d'où le nom de "Marielistes" dont on qualifie ces gens. Le mot "racaille" peut qualifier à la fois tous les délinquants dont Castro s'est ainsi "débarrassé" - cf le film Scarface - et tous les gens "ne croyant plus en la Révolution" qui étaient considérés de fait comme des "traîtres" ou tout au moins comme des "couards"; ndt).

(Chavalonga, El Goyo et Juan de Dios)


Jusqu'à cette époque ici tous les dimanches on jouait la rumba. Mais également, comme toujours, le premier janvier et le jour de la Fête des Mères, qui sont "les jours parfaits". Nous avons eu la chance que viennent beaucoup de rumberos, de Guanabacoa comme de Marianao, de partout. C'était une peña, une rencontre, alors y venait Juan de Dios, le directeur de Raices Profundas, qui est celui qui nous a initié au monde du spectacle. Il est venu nous chercher alors qu'on était par hasard dans une rumba à Santos Suárez. Il est passé et nous a dit: "venez par ici", et on a commencé à jouer avec lui, et après il est venu chez nous tous les dimanches. Traditionnellement, c'était le dimanche…
À une époque les rumbas étaient interdites, parce que dans les rumbas il y a toujours eu des bagarres, des intrigues, des embrouilles, parce que la rumba est la musique du petit peuple, des basses classes. Après la Révolution les choses ont changé, aujourd'hui, pour des raisons culturelles, les gens sont instruits, la rumba n'est plus une bagarre… c'est devenu autre chose. Grâce au processus que nous avons eu ici. Il faut rendre grâce à la Révolution pour ce côté-là, elle a aidé beaucoup les choses traditionnelles. Avant la rumba c'était coups de poings, coups de feu… il y avait sans cesse des problèmes. Aujourd'hui c'est fini: tout a changé. Nous avons maintenu nos traditionnelles peñas du premier janvier et de la Fête des Mères. Parfois c'était difficile quand on nous contactait en même temps pour aller jouer une cérémonie pour tel Saint ou pour telle divinité.
Et parfois vient le premier janvier Mario Dreke "Chavalonga", comme cette année, un monsieur respectable du monde de la rumba cubaine. Il est venu, tout vieux qu'il est avec ses 80 et quelques années. "Chinitos, je viens ici pour passer un moment de rumba avec vous", nous a-t-il dit. Nous avons dû le contenter, nous avions un accord avec lui, nous étions épuisés, mais il y a eu ce jour-là une formidable rumba (…).
Mais notre quartier… tu sais que nous sommes loin du centre. Et ce n'étais pas toujours facile d'arriver jusqu'ici. Si on avait été plus au centre de La Havane, la peña la pus fameuse de tout Cuba aurait été celle des Chinitos. (…)
Actuellement, il existe un projet, comme une sorte de "Buena Vista Social Club" qu'ils vont faire très bientôt, et pour cela ils sont venus me chercher, ils veulent que je joue le guarapachangueo. Est venu León (Argeliers León?) et il m'a dit: "Pedro, tu es celui qui doit participer, parce qu'ils veulent réunir tous les créateurs", des messieurs qui viennent de je ne sais quel pays, de la culture, et de tout ça… ils veulent faire la même chose que ce qu'il ont fait avec le Buena Vista Social Club, réunir tous les grands soneros… Le type est venu jusqu'ici l'autre jour. Pourvu que ça marche, si je ne peux pas le faire, j'enverrai Piri.
Il y a tant de choses à raconter. Mais c'est la vérité: le guarapachangueo est d'ici, Piri est né ici, et je lui ai toujours enseigné - comme il est mon fils - je lui toujours enseigné à rester très modeste, tout le monde le sait ici.
Piri a fait partie du groupe "Aspirinas en Guaguancó", un groupe d'amateurs de là-bas, créé par les Aspirinas eux-mêmes. Le groupe était très fort, mais je ne sais quel problème est apparu et il s'est désintégré. Le groupe a voyagé en France, mais je ne sais ce qui s'est passé ensuite. Ensuite, Juan de Dios est venu chercher Piri pour Raices Profundas. Piri ne s'est pas présenté à l'audition comme le font les autres, c'est Juan de Dios qui a dit: il me faut Piri. Alors il y est entré, et il a été un pillier là-bas, avec Eduardo, Cusito (Jesús Lorenzo Peñalver), et avec tous les bons rumberos qui y sont maintenant. Piri promet beaucoup avec ce projet, et j'espère qu'il va être très grand. parce qu'il joue beaucoup de styles de tambours: pas seulement les batá: il est rumbero, il joue le palo, il joue une foule de styles, et il lui reste beaucoup de champs à semer. Ce qui viendra, avec le temps, en restant très modeste. Vois-tu, je fais cela avec le coeur, et ainsi, je te prouve qui je suis, avec mes mains, mais ce que j'ai à l'intérieur je vais te le montrer aussi. C'est ça qui touche le spectateur, aux gens, au public - tu comprends? - c'est ça le plus beau."

(Propos recueillis par Antoine Miniconi - traduits par Patrice Banchereau)

samedi 23 décembre 2006

Entretien avec Pedro López (VO)

Antoine: "Cuéntame primero la vida de ustedes, de los Chinitos, de los tíos"
Pedro: "Bueno, nosotros mantenemos una tradición familial: Mi papá, mi tío, ellos tenían un sexteto.
Yo no había nacido cuando ocurría eso. Yo me llamo Pedro López Rodríguez. Los Chinitos - no somos tantos - somos "achinados", nos dicen Los Chinitos desde que fuimos fundadores del reparto, de esta zona, de la Corea, aquí.
Entonces tradicionalmente ellos se reunían, los dias de las madres, los fin de año, en las Pascuás, y formaron su gateque ahí, su música de Son, pero después terminaban con una rumba, lo mismo tocaban con el escaparate que en el aparador, que en un cajoncito…
y eso fue creando entre nosotros algo interior, que se interiorizó. Y a partir de ahí mantuvimos esa tradición ahí, todos los años, sin ninguna idea de que esto fuera a tener tanto valor el día de mañana, ¿no?
Después, a parte de eso, con el trancurso del tiempo fuimos creando, en la decada del setenta al ochenta - fue a partir del 75, 76, mas o meno ese tiempo - creamos como una especie de polirítmia. Un amigo que era uno de los mas grandes rumberos que hay en Cuba - le decían "El Llanero", creo que su apellido es Martínez, que vive allá en los Estados Unidos ahora, por una forma despectiva le pusó a ese ritmo que creamos nostros el nombre de "guarapachangueo".
Iniciamos esto por un momento de canción espontanea, no fue que se hizó con la idea que se iba a cojer tanto valor. Y viene este el la pared, "tikitin" y
el otro "tukutum"… Y empezamos con un cajón que se dice… una mesita de noche, de mi abuela Mamaíta. Esa cajita la convertimos en quinto, y mi tío tenía un cajón, que él mismo creó, de playwood, que tenía un motor con una hélice pa' hechar aire, era una forma de ventilador, y ahí empezamos con el tumbao', sentado en el cajón del ventilador, y ahí cambiamos mucho de puesto, "yo voy ahí, métete allá". Empezamos a hacer de esas rumbas, y cuando todo el mundo se reunía esos días… nosotros tocamos; Fue un día cualquiera, y entonces todo el mundo "¡e, e!", mi familia, todos, mi hermano José, y entonces, salió de todo eso lo que se dice "guarapachangueo", El Llanero lo puso de una forma despectiva "guarapachangueo", "¡Mira eso, el guarapachangueo que están tocando!".
Y a partir de eso creamos el nuestro mismo estilo de cajones, que es el verdadero guarapachangueo.
Y después, el primer cajón cónico que se hizo en Cuba, fue por un amigo, Ifraín Kofá Frioles, que me dijó:
"te voy a hacer un cajón que sea cónico pa' que no se resbale". Que fue el primero que hizo el cajón ese. Con mediación de eso, yo trabajaba a la carpinteria con él, y aquello mi dió todas las facilidades para yo después sí crear esto.
Después con el tiempo vienen los hijos. Y Piri se crió con nosotros aquí. Y de chiquito él tocaba ya, desde los cuatro años tocaba ya cualquier cosa, que tenía inclinación a eso. Se crío, venía del vientre de su madre, venía oyendo música: rumba y todo eso. Nostros no practicamos nada santoral, que sea religioso: lo de nosotros era rumba, rumba y rumba.
Ya posteriormente, sí. Ya, nos inclinamos, cuando se hizo Raices Profundas, a empezar la cosa ya afrocubana, en el 1980. Y ahí empezó cojiendo esa la fuerza. Tuve la suerte y el privilegio de encontrar uno de los primeros músicos grandes de Cuba, Changuito (José Luis Quintana). No fue una entrevista, sino que tenimos un diálogo con él respeto a este ritmo nuevo que se había creado. Y le demosté algo, y después él me dijó que eso lo tenía incluido en su drums.
A Changuito le gustó mucho eso. El guarapachangueo fue cojiendo fuerza, y cojiendo fuerza.
Hoy en día, hay muchos grupos que hacen muchas cosas con el guarapachangueo, porque eso es una matriz. El guarapachangueo es una matriz. Pero han hecho un polirítmia sobre eso. Como Pancho Quinto, que fue el primero. Pancho Quinto, Maximino (Duquesne)… Después del guarapachangueo hicieron sus creaciones. "Sus evoluciones", dijieron ellos, que era con respeto a la matriz esta. Pero nosotros tenimos la suerte que con Yoruba Andabó compartimos también. Nosotros participamos a las fiestas con ellos, a las rumbas con ellos. Y entonces ellos aprobaron siempre esto. Y nos dieron la virtud, de apoyar esto,
y de ellos también hacer sus cosas.
Pero todo eso nació de la matriz del guarapachangueo, creado por los Chinitos, eso es de nosotros, con la bendición de ellos. Y de todos los grandes rumberos: Juan de Dios (Rámos), (Ricardo Gómez) Santa Cruz, Alambre… (Antonio Rivas?) Alambre, uno de los rumberos grandes también aquí. Tuvimos suerte de encontrarlo allá en Matanzas, con los Muñequitos de Matanzas, y hasta ellos, están empleando, han cambiado mucho de su patrón, y tienen una de sus canciones - que no me recuerdo ahora - donde viran "tukutum", para el guarapachangueo.
Es decir que luego el guarapachangueo cogió una fuerza tal que todo el mundo lo está haciendo. Hay muchas polirítmias, muchas cosas que no entiendo. No que sean malas, sino que no las entiendo. Porque creo que en la música siempre hay que darle espacio, lo mismo para él que está percutiendo, o, para él que está, no sé, el guitarrista, porque no sé mucho de música, yo sé que hay una clave negra y otra de son, pero no puedo hablar de pentagrama y todo eso, de síncopa porque yo no sé nada de eso.
Pero producto de eso, están haciendo muchas cosas que a mi no me gustan, no que sean mal hechas, sino que a mi no me gustan. Porque creo que hay que tener un diálogo entre la música - el canto, y el expectador. Para mi tocan rumba y todas las polirítmias son buenas, pero hay que me gustan y hay que no me gustan.
Y a partir de eso entonces el Piri ya desde chiquitico al lado de nosotros aquí, ya tocaba un kónkolo, ya, en el tambor de fundamento, en el que estamos con Amador, en el tambor de Pancho Quinto, estuvimos con Román (Diaz), y después entramos en la esencia, de Pedro Aspirina, pero Pablo Addé, porque Pedro Pablo era el fundador de los tambores con Pablo Roche. Empezó de niño con pablo Roche. Y entonces, tuvimos la suerte de que nos asimilaron, por nuestro carácter, nuestra forma, nuestras correciones. Pedro era un hombre de respeto, un hombre muy serio. Y entonces, tuvimos la suerte de empezar con él, y ahí cojiamos muchos golpes, ahí estaba la esencia de lo que es el tambor batá, como Angarica, como Jesús Pérez, que él (Pedro?) era tamborero con Jesús Pérez, y que Jesús Pérez fue alumno de Pablo Roche.
Entonces hay que decir, que nosotros y Piri tuvimos la suerte cuando pequeño cayó "en la Mafia", con ellos, yo puedo decir eso, en la parte grande de la música de Añá, del tambor. Y allí se inició, que había fuego ya. Y entonces todo el mundo, por el oído de… por ejemplo Mario Aspirina, Mario Jáuregui, de los Aspirinas mismos, que son familia todos ellos, de que nosotros los admirabamos mucho, y todo salía de… "voy por aquí, mira esto así, ven pa'cá'…" es decir de ayudarnos, y Piri ya venía quemando ya, ya tocaba un segundo, sabía todos los golpes, y eso. Era un prodigio, lo admiraban tanto, y eso fue la suerte que tuvimos nostros.
Que todo viene tradicionalemente de nosotros, pero nada de yoruba, lo nuestro era rumba. Que hay una tesis, que esa es mía, que la rumba es la mas perfecta, popular, de todas las músicas populares que hay en Cuba la mas perfecta es la rumba. Dicen que la popular es el Son. Claro, que el Son es el primero junto con el Yambú, y con el Changüí. Creo que primero salió el Yambú. Pero a partir de aquellos años atrás que no puedo aprofundizar porque no, no puedo decir… pero empezó con el "tukutum-kutum", y incrementando eso con la marímbula, y después el Son, con los septetos, todo eso, pero todo eso proviene de una iniziativa, es decir que primero está la rumba y después todo vino atrás de eso. De la popular a la folklórica. No sé, hay scientíficos que se ocupan de eso, porque ellos estudian. Pero para mi tesis, yo, pa'mi, creo que la música mas popular que hay en Cuban es la rumba.
Fíjate: tu vas a una fiesta, cualquier fiesta. Y cuando se termina la fiesta la gente se quedan sentados y cogen una lata, un palo y empezan a tocar. Después de la fiesta, cuando se termina la música empeza otra música, y termina en rumba. Es una tesis mía. (…)
Así empezó, es una tradición de familia. Después tuvimos la suerte con Irián, que era el mas pequeño de nosotros, mas chiquito, y Irián captaba mucho. Y después de ese mismo Irían ya creció Piri, y pegando a irían, Irián le dió mucho, tienen la mente fresca, sin problema, ellos tenían todo. Y tenían la facilidad de emplear su capacitad en eso, en Añá. Siempre lo han hecho a duo. En Abbilona, venieron otros a tocar el batá, y Irián los dijó: "no, no… - Piri, venga tú pa' que sea bien hecho". Y el segundo lo hizo Piri. Piri primero se puso unos aurífonos en la cabeza, y grabó todo, en primera vez. (…)
El cajón guarapachangueo, pa' tu sepas, hay gente que dicen que lo creó "Areíto". No. Lo primero que salió de aquí se hizo para Pancho Quinto. Lo hizo Ifraín Kofa Frioles, que se fue del país. Él vivía aquí, y se fue después para los Estados Unidos a vivir, y lo mataron allá, que era unos de los mas grandes galleros (de combates de gallos) que había en Cuba también. Que jugaba de los gallos en el Club Habana que para entrar allá con 16 años era difícil, y él entró. Porque él era uno de los mejores espueladores y hacía espuela aquí en Cuba por el problema de los gallos. Y estaba también en la carpinteria. Él me decía: "te voy a hacer un cajón cónico que no resbale". Y ese cajón se quedo en un museo aquí en Cuba, que Irián lo dejó después de una actividad. Entonces del cajón cónico fue él el iniziador, y más nadie aquí en Cuba. (…)
Sin embargo Yoruba Andabó se mantiene, con mi hermano Bertico, el mayor de nosotros, que entró a trabajar con ellos, y fue fundador de Yoruba Andabó con Pancho Quinto (en 1981?). Y él que llevaba el "kinpakin-pakin-patokotón" era Bertico. El Chori, y Julio el Gordo lo mantienen. Los demás son cosas que no entiendo. Entonces el cajón Guarapachanguero fue Berto que mantuvo esa tradición, con Pancho Quinto y su iniziativa con la cuchara y con los tres batá, una onda muy particular. Eso era Pancho Quinto, ya eso sí ya se ha perdido ya, el formato del Guarapachangueo, que ya era cosa de Pancho Quinto. Pero tu vés, que guarapachangueo viene de aquí, de la Corea."

Antoine: "¿Me dijeron que había una rumba aquí cada fin de semana, en esa cuadra, no?"
Pedro: "Aquí todos los domingos... nosotros estuvimos en un tiempo, en la decada de los 70, hasta el 1980 que se fue la escoria... como dicen: "la escoria", que se fue la gente del país. Aquí hasta el 1980 aquí todos los domingos rumbeamos. Pero teníamos también tradicionalemente los días de las madres y los días primeros de Enero, esos son los días perfectos... Tuvimos la suerte que venían muchos rumberos aquí, igual de Guanabacoa que de Marianao... de todo. Porque esto es una peña, entonces Juan de Dios Rámos, el director de Raices Profundas, que fue el que nos inicio a nostros en lo artístico. Vino a buscar a nosotros, porque casualmente estábamos en una rumba en Santos Suárez... Pasó y "¡Vienen ustedes pa'cá!", y nos vino a buscar aquí y empezamos a rumbear, y Juan de Dios venía con todos los rumberos por aquí. Era tradicionalmente todos los domingos aquí.
Antes no se permitía rumbear - porque el problema es que en la rumba sí hay problemas de piques, intrigas, cosas... porque la rumba es del bajo mundo. Ya hoy por la Revolución las cosas cambiaron, ya todo es un problema cultural, la gente estan instruidos, la rumba no es un piñazo... la rumba es otra cosa. Gracias a nuestro proceso que tenemos aquí. Por este lado hay que admirar porque hubo mucho apoyo a todas estas cosas tradicionales... Que antes la rumba era una galleta, un tiro... siempre había problema. Pero hoy en día con el proceso que tenemos no hay problema... todo ha cambiado. Entonces mantuvimos esta tradición y se mantiene los días de las madres y los días primero de enero. Por cierto hay veces que nosotros estábamos complicados por problemas de tambores, de ir a tocar, religiosamente con lo usuario, que nos contratan para un tambor para X santo, o X deidad.
Y a veces vienen el día primero, como este año que paso ahora, Mario "Chavalonga" Dreke, que es un señor para respetar también en la rumba cubana... vino todo "jodido" con 80 y pico años que tiene ya... "Chinitos, vengo a estar un rato con ustedes a rumbear aquí". Tuvimos que complacerlo, con éste teníamos compromiso, estábamos agotados, y se formó tremenda rumba.
Pero el reparto este, tu sabes que está apartado, y era muy incómodo de llegar hasta aquí. Si fuéramos mas céntrico... los primeros que hubiera sonado en toda Cuba aquí hubiera sido la de Lo Chinitos...
Y hoy en día, mira, van a hacer como un "Buenavista Social Club", van a hacer esto en enero ahora, y vinieron a buscarme ahí, y quieren que yo toque "el guarapachangueo". Vino (Argeliers?) Leó(n?) y me dijo: "mira, Pedro, tu eres él que tiene que ir, porque ellos quieren recolectar a todos los creadores... Unos señores que vienen de nosé que país, de la cultura y eso... quieren hacer lo mismo que hicieron con Buenavista Social Club de reunir a todos los grandes soneros, a todos los grandes... Vino el otro día mismo a aquí... ¡Ojala! Si yo no puedo, mando a Piri.
Y hasta ahí, bueno así, hay muchas cosas que contar... pero bueno no tengo mucho... Esa es la verdad: el guarapachangueo es de aquí, Piri nació aquí, y aparte le enseñé siempre yo que como es mi hijo, y nació conmigo yo le enseñé siempre a ser muy modesto en esto, aquí todo el mundo sabe...
Entonces Piri estuvo con "Aspirinas en Guaguancó", un grupo de aficionados de allá, de los mismos Aspirinas. El grupo estaba fuerte, un  grupo fuerte, empezó pero después, no sé que problema hubo, no sé que pasó, y se desintegró el grupo. Esa gente viajaron a Francia y todo, después entonces no sé que problema hubo, no sé. Y bueno, después Juan De Dios mando a buscar a Piri para Raíces Profundas. No fue él que se presentó con la convocatoria, fue que Juan de Dios dijó: "me hace falta Piri aquí", y Piri entró, y es un bastón en Raíces Profundas con Eduardo (?), Cusito (Jesús Lorenzo Peñalver), con todos los grandes buenos que hay. Pero Piri promete mucho en esto, y yo espero que va a ser muy grande también. Porque toca muchas cosas: no es solamente batá, él es rumbero, toca palo, toca una pila de manifestaciones popular, tiene muchos campos todavía por sembrar. Lo demás es tiempo y ser muy modesto, lo que hay es que ser muy modesto en esto. Mira: yo hago esto de corazón y yo te demuestro quien soy yo, con mis manos, pero lo que tengo aquí adentro te lo voy a demostrar. Eso es lo que le llega al expectador, lo que le llega a la gente, ¿tu me entiendes? Es mejor".

Propos recuellis par Antoine Miniconi

Discographie


La série "Abbilona" est un projet ambitieux qui a considérablement changé la manière de présenter au public la musique yoruba de Cuba enregistrée. Auparavant, les plages discographiques obéissaient à un format habituel dans la musique commerciale: en effet, on n'enregistrait que des morceaux d'environ 5mns, correspondant à la durée "classique" de l'industrie du disque. Ces durées ne correspondaient en rien à la réalité de la musique yoruba de Cuba, dans laquelle, pour faire "venir le Saint", on peut chanter et jouer jusqu'à 30 minutes pour une seule divinité, la musique évoluant toujours du "lent et calme" jusqu'au "rapide et intense". Dans "Abbilona", les Chinitos enregistrent des plages sonores pouvant aller jusqu'à 20 minutes, correspondant mieux à la réalité de ce qui se passe dans les rituels.
Le projet Abbilona inclut également toute une série de chanteurs de la nouvelle génération, tels: Jesús "Cusito" Lorenzo Peñalver, à la voix rauque, Javier Pina, au style mélodique résolument moderne, Jesús "El Corto" Zayas, Alain Fernández, Naivi Angarica, etc…
Cette génération de chanteurs n'aurait peut-être jamais eu l'occasion d'enregistrer sans la création de ce projet. La musique d'Abbilona est donc le reflet de la tendance actuelle de cette musique traditionnelle qui subit une évolution logique, le style n'ayant cessé d'évoluer depuis les débuts du XXe siècle.
Les séries de cds "Abbilona" ont pour but d'enregistrer de manière quasiment exhaustive le répertoire des divinités yoruba. Après avoir entendu les volumes 3 et 4 (pas encore disponibles dans le commerce) consacrés à la divinité (ou "Oricha") Eleguá, nous avons pû constaté que l'intégralité de son répertoire et de ses "toques" avait été enregistrée dans les quatre volumes. Si le style des tambours et le choix des chants est résolument actuel, ce témoignage discographique est indéniablement unique en son genre, et ne présente pas seulement un intérêt culturel, mais aussi un intérêt scientifique certain.
Ce projet a eu également pour conséquence de provoquer la "réaction" du chanteur "officiel" numéro un, Lázaro Ros, qui a imité Abbilona en publiant lui aussi une série de 13 cds, laissant ainsi son témoignage avant de disparaître en 2004.
Des 45 cds prévus dans la série Abbilona, seuls 16 seulement sont disponibles actuellement.

Abbilona "Eleguá-Ogún-Ochosi" 1

Abbilona "Oricha Oko y otros" 1

Abbilona "Agayú" 1

Abbilona "Changó" 1

Abbilona "Obatalá" 1

Abbilona "Oyá" 1

Abbilona "Ochún" 1

Abbilona "Yemayá" 1

Abbilona "Eleguá-Ogún-Ochosi" 2

Abbilona "Oricha Oko y otros" 2

Abbilona "Agayú" 2

Abbilona "Changó" 2

Abbilona "Obatalá" 2

Abbilona "Oyá" 2

Abbilona "Ochún" 2

Abbilona "Yemayá" 2

Il sont assez difficiles à trouver en France, mais tous figurent sur le site de vente en ligne spécialisé "Descarga.com", qui propose un "package" à $149.95 (port non-compris) pour les deux premières séries. (Chaque cd est à $18.98).
Dernière minute: On peut également les commander à 170,05 euros port compris sur:
http://www.ritmacuba.com/CDsAbbilona.html